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Biélorussie : la quête démocratique d’un peuple révolté

Dernière mise à jour : 16 déc. 2020

Le 9 août dernier, des milliers de biélorusses sont descendus dans les rues de Minsk pour manifester. Alors qu’Alexandre Loukachenko a été réélu pour un sixième mandat, l’opposition démocrate réclame son départ, l’accusant d’avoir falsifié les élections.


Le célèbre pays d’Europe de l’Est, connu pour son architecture stalinienne, fait face à une crise sociale et politique. Avec un régime faisant écho au communisme de Staline, les pays occidentaux considèrent la Biélorussie comme étant la dernière dictature d’Europe, tandis que le gouvernement de la République de Biélorussie se proclame comme une démocratie.


Tout commence en 1994, lorsque Loukachenko, encore simple député, publie un rapport sur la corruption dans le pays. Se plaçant ainsi comme le champion de la lutte contre la corruption, Loukachenko reçoit ainsi le soutien d’une population fatiguée par le désordre politique. Le 10 juillet 1994, il remporte les élections présidentielles avec plus de 84% des voix grâce à sa stratégie populiste qui lui permet de recevoir l’appui des communistes. En 1995, le drapeau blanc-rouge-blanc de la République populaire de Biélorussie est remplacé par celui des quarante dernières années soviétiques, simplement débarrassé de la faucille et du marteau communistes.















Le drapeau n’est pas la seule chose que Loukachenko modifiera. Pour se maintenir au pouvoir, le dirigeant va passer un « contrat » avec son peuple. En échange de libertés bafouées et de droits de l’homme malmenés, il lui promet une double sécurité. La première est économique. Grâce à ses fonctions publiques importantes et ses subventions dans les domaines de l’industrie et de l’agriculture, la Biélorussie fait partie des pays les plus dynamiques de l’ancienne URSS. Cette économie florissante repose avant tout sur une étroite relation avec la Russie qui est son premier partenaire commercial (50 % des importations biélorusses proviennent de Russie). Cette proximité arrange le président Vladimir Poutine qui souhaite protéger sa façade ouest de l’Europe et de l’OTAN.


En tant que jeune pays enclavé, sorte de zone tampon entre l’Europe et la Russie, la Biélorussie ne prend pas le risque de trop se rapprocher d’un voisin et tente d’affirmer sa spécificité nationale sans pour autant offenser la Russie dont elle dépend économiquement. C’est en effet la deuxième sécurité que Loukachenko promet à son peuple : une sécurité existentielle. Cependant, ces sécurités ont un prix. La Biélorussie est un Etat autoritaire. Le gouvernement fait la promotion d’une idéologie d’état et du patriotisme, formate la jeunesse, surveille sa population et emprisonne les leaders d’opposition. A cela s’ajoute le culte de personnalité d’Alexandre Loukachenko. Ce dernier fait la promotion de son image en tant qu’« homme du peuple » et ses partisans le surnomment « Batka » (père en biélorusse). Une appellation qui fait évidemment écho à Manifestants armés du drapeau blanc rouge INTERNATIONAL Sources : Voyages Biélorussie, Cairn Info, L’Effet Papillon, Arte, Le Monde, Le Figaro, 20 minutes, Diplomatie.gouv.fr 7 celle utilisée pour désigner Staline en URSS (« petit père des peuples »).


Le nombre de candidats aux élections est très réduit et la plupart du temps les habitants ne les connaissent pas car ils ne sont pas médiatisés. La chaîne nationale, quant à elle, est au service du parti de Loukachenko. Les journalistes et correspondants étrangers sont arrêtés par la police et les blogs, chaînes YouTube ou articles critiquant le régime sont censurés.


Après 25 ans de pouvoir sans partage, 2020 marque un autre tournant. L’apparition d’une classe moyenne, les difficultés économiques et la crise du coronavirus ont surpris le régime qui n’a pas su prendre de mesures. Ensuite, la décision de Loukachenko de laisser Svetlana Thikanovskaïa se présenter aux élections présidentielles a offert à l’opposition démocrate une leader inattendue. Malgré le soutien de la population pour l’opposante, Alexandre Loukachenko a été réélu avec plus de 80% des voix en août dernier, déclenchant ainsi les plus grandes manifestations de toute l’histoire du pays. Plus de 100 000 manifestants et grévistes de tous les milieux, armés du drapeau blanc rouge blanc en signe d’opposition au régime, réclament des élections réellement démocratiques ainsi que le départ de Loukachenko. Pourtant venus manifester dans une démarche pacifique, les manifestants sont victimes de violences policières qui sont à l’origine d’un grand nombre de blessés. Les partisans de l’opposition sont emprisonnés dans des conditions désastreuses et vivent dans une peur constante, en particulier pour les leaders qui sont parfois obligés de s’exiler. C’est le cas de Svetlana Thikanovskaïa qui s’est réfugiée en Lituanie. Un pays avec lequel Loukachenko a décidé de fermer ses frontières, accusant les occidentaux de vouloir le renverser dans le but d’affaiblir la Russie.


Le dictateur biélorusse semble avoir choisi son camp, celui de Poutine qui lui a récemment versé un prêt d’1,5 milliard d’euros et a affirmé que les soldats biélorusses et russes pourraient s’unir. L’Union européenne appelle Moscou à ne pas intervenir en Biélorussie et a d’ailleurs manifesté son soutien à l’opposition en refusant de reconnaître Loukachenko comme président légitime, elle s’est même accordée à le sanctionner. Le Parlement européen, lui, a décerné aux figures emblématiques de l’opposition démocratique, ce jeudi 22 octobre, le prix Sakharov des droits de l’homme.

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